1) Histoire de la pieve

 

 

 

● On sait peu de choses concernant l'histoire du village de Marignana.

 Selon Jean-Marie Arrighi, les suffixes -anu, -ana, et en particulier dans le cas de Marignana, indiquent le nom d'un ancien propriétaire romain.

 On peut deviner que le village a été fondé entre la fin du 15ème siècle et le début du 16ème siècle, peut-être autour de 1500 :

 en effet, le village n'est pas mentionné (ni en tant que village, ni même comme communauté) dans un document de 1485, où l'on retrouve pourtant les noms des 17 communautés alors établies (parmi lesquelles : Revinda, Evisa, Lo Tasso, e Cristinacce, Sia, Ota et Paomia), alors que son nom apparaît parmi les établissements de population répertoriés en 1530. Voici quelques unes des communautés existantes en 1530 : Evisa, Arragio, Lo Tasso, Marignana et Chidazzo.

 Dans "Eléments pour un dictionnaire des noms propres" de l'Adecec, il est question du village en 1520. Selon ce même document, le village fait alors déjà partie de la pieve de "Sevendentro", qui inclut (écriture du document respectée) : Laragio, Evisa, e Cristinachie, Lo Taxo, Chidazzo et Marignano. Sous les dénominations Arragio ou Laragio, Lo Tasso ou Lo Taxo, il faut bien sûr reconnaître : l'Araghju (prononciation : a-raghju) et le village aujourd'hui en ruine du Tassu..

 On sait quand même que Chidazzu a été peuplé en premier, par des berges niolins qui transitaient par là pour transhumer vers les montagnes ou les piaghje. Peu de temps après, pour les mêmes raisons, quelques uns d'entre eux se sont installés au lieu-dit "Marignana" (ou "Marignano"?), qui a en fin de compte attiré plus d'habitants.

 En ces temps (au moins entre 1485 et 1530), comme nous venons de le voir, il y avait la pieve de Sevendentro, mais il y avait également celles de Sia (avec par exemple : Ota, Sia, Astica, Vetricia, Curzu jusqu'en 1485; puis seulement Ota après que l'habitants eussent fui en Balagne), de Salogna (avec par exemple : Piana, Vistale, Revinda), de Paomia (seule communauté : Paomia). A également existé la pieve de Revinda pendant quelques années, mais elle a rapidement été intégrée à celle de Salogna (avant 1500).

 

 A cause des guerres successives opposant d'abord les Cinarcais au Gênes aussi bien qu'à l'Office de Saint-Georges, les habitants du Sia ont été contraints par le gouverneur de quitter définitivement la région afin de s'installer à Calvi et ils n'ont pu revenir qu'en 1516, sous certaines conditions.

 Commence alors une période d'assauts de la part des pirates non chrétiens. Les côtes sont évidemment les premières menacées, et la population locale en souffre. La pieve de Salogna est attaquée plusieurs fois et souvent en difficulté. Les pirates montent même en montagne, comme en 1550, quand le village d'Evisa est assailli et que 80 hommes (c'est-à-dire le quart des 260 habitants recensés en 1537) sont faits prisonniers et enlevés.

Pour empêcher la fuite vers les montagnes des Salognais qui vivent en bord de mer, l'Office de Saint-Georges entreprend la construction (aux frais des villageois) et le renforcement de tours le long des côtes : entre 1548 et 1550 sont décidées la fortification de la tour de Sia (tour de Portu aujourd'hui) et la construction du fortin de Ghjirulata.

la tour de Portu aujourd'hui, dans les temps anciens tour de Sia

la tour de Saone

la même tour avec la Paglia Orba au fond

Ses renforcements ne suffisent pas et ne dissuadent pas les prédateurs non chrétiens de continuer à essayer de voler et de tuer. Bien entendu il rencontre la résistance des villageois, qui ne sont pourtant pas guerriers de métier : le 12 avril 1564, 500 pirates débarquent à Chjuni (vers Saone) et partent vers la montagne. Ils sont d'abord retenus par les Chidazzais, puis arrivent des villageois de Marignana, d'Arburi, de Vicu et de Rennu. 300 de ces pirates sont capturés, puis exterminés, et les autres prennent la fuite. Un mois plus tard se produit un nouvel assaut pirate : ils sont cette fois 150, et sont une fois de plus vaincus et contraints à la fuite.

Mais malgré cela, à la fin du 16ème siècle, les piaghje sont abandonnées pour de bon : les pieve de Sia et de Salogna, souvent ravagées, sont ruinées, et celle de Paomia est déserte en 1584. Suite à ces malheurs, la République de Gênes, qui entre temps a repris la gestion des affaires qu'elle avait confié à l'Office de Saint-Georges, décide d'édifier 6 nouvelles tours (parmi lesquelles la tour de Carghjese), comme d'habitude aux frais des habitants, entre 1605 et 1611.

 Mais le fait est que ces mesures n'apportent aucun résultat satisfaisant, et 50 ans plus tard, les terres du Sia, du Salogna, et de Paomia demeurent à l'abandon, à l'exception d'Ota dans la Sia.

Néanmoins, en 1676 est installée à Paomia la communauté grecque de Vitylo, composée de 400 familles maniotes.

A la fin du 17ème siècle, les pieve de Sia et de Sevendentro sont suffisamment développées pour assurer et garantir leur propre subsistance quel que que soit le déroulement des choses : les villages d'Ota, de Cristinacce, d'Evisa, de Chidazzu, du Tassu et de Marignana sont fixés, enracinés si l'on peut dire, bien que leurs territoires ne soient pas encore définis. Ils procèdent à l'élection de leurs officiers, podestà et "Pères du Commun", et ils se rassemblent pour gérer les affaires communes et organiser l'habitat. Cela se traduit par l'augmentation de la culture du châtaigner, qui a envahi tout l'ubac (= umbriccia) (au-dessus de 500 mètres d'altitude) de la vallée (et donc les alentours de Marignana), et par l'exploitation des oliviers et des figuiers, qui ont eux conquis l'adret (= sulana) en bas. Les côtes du Sia sont dévolues aux céréales et aux déplacements des troupeaux.

Certaines communautés sont abandonnées, alors que Piana, Vistale et Revinda sont reconstruites. En particulier, un Chidazzais, Giovan Tomaso Ceccaldi, occupe de nouveau le site de Piana accompagné de quelques familles de Chidazzu. Cette communauté dépend de Marignana et de Chidazzu jusqu'en 1713, quand elle devient un village à part entière.

● "Les Révolutions de Corse", entre 1729 et 1769, affaiblissent le territoire et les Grecs sont chassés de Paomia en 1730 par les Vicolais, mécontents de leur présence en ces lieux qu'ils estiments être les leurs. Ils trouvent refuge à Aiacciu.

Après la vente de la Corse à la France par les Génois, est créée la pieve de "Sevinfuori" chì réunit les anciennes pieve de Sia et de Salogna en 1771, et en 1773 est fondée la cité grecques de Carghjese.

Ces pieve prennent le nom de "canton" en 1790, et Carghjese est désormais liée au "canton de Sevinfuori". Ces cantons seront également appelés "canton d'Evisa" (Sevindentro) et "canton de Piana" (Sevinfuori).

De nos jours ils sont réunis au sein du "canton des Deux-Sevi", dont le chef-lieu est Piana.

 

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